vendredi 3 avril 2009

BENIN : PATRIMOINE CULTUREL

Sauver absolument les archives de radio et de télévision

L’UNESCO a avancé il y a quelques années un chiffre qui donne le vertige : 800 millions d’heures de radio et de télévision sont en danger sous l’effet de plusieurs facteurs. Malgré cela, on n’a pas le sentiment que les choses ont évolué. Car dans de nombreux pays la gestion des archives audiovisuelles reste et demeure un luxe auquel les politiques de développement ne veulent guère souscrire. Ce qui veut tout simplement signifier que la sortie de l’auberge est encore loin pour ces documents porteurs de l’histoire et du vécu des peuples.
Dans les pays du Nord, à quelque exception près, l’indifférence des premières années est en train de céder progressivement la place ces dernières années à une grande solidarité en faveur de ces documents. Ce qui explique, à titre indicatif, la mise en œuvre d’outils technologiques à l’échelle européenne autour desquels sont serties des actions de conservation, de préservation et de sauvegarde.

Puisque l’enjeu est bien à ce niveau, sauvegarder les documents anciens, témoins de la culture des peuples.

L’Institut National de l’Audiovisuel, INA en France a reçu la lourde responsabilité de sauver et d’entretenir plusieurs décennies de radio et de télévision au bénéfice de toute la population française, et notamment dans le grand intérêt de la jeune génération et de la postérité.

Pour la Francophonie, nous sommes en face d’un facteur de diversité culturelle. Cette conviction veut souligner en toute objectivité l’activisme de l’organisation et sa totale implication dans les nombreuses réflexions autour de la sauvegarde.
L’Afrique et l’Asie semblent la plus grande préoccupation dans cette messe d’actions et de projets pour les archives. La mise en œuvre du modèle de numérisation AIME, conçu avec l’aide du Conseil International des Radios et Télévisions d’Expression Française, CIRTEF est symptomatique de cette vision de développement de l’OIF autour du patrimoine audiovisuel. Dans plus d’une dizaine de pays africains dont le Bénin, un travail a commencé. Malheureusement, il ne saurait remplacer les énormes pertes récoltées dans le fond archivistique de ces pays.

Bénin : comment rattraper ce passé?

Toute la question est là. Mais très peu de personnes se la posent. Les archivistes, documentalistes, acteurs en première ligne de la préservation assurément mis en minorité en raison de la dévalorisation de leurs activités ne croient plus tellement à la chose. Difficile d’évaluer avec précision le capital archivistique du Bénin, tant la quasi-inexistence d’un système de gestion pose problème. En outre, beaucoup de documents ont disparu sous l’effet de plusieurs facteurs : négligence, facteurs climatiques, manque de moyens, pénurie de ressources humaines spécifiquement formées.

En l’absence d’indicateurs fiables, on estime dans ce pays à près de 100 000 heures, les pertes enregistrées dans le secteur. Sinon, comment concevoir que moins de 20 ans après, il soit aussi difficile de reconstituer les archives de la Conférence nationale de Février 1990 ? A qui la faute, lorsque la prise de conscience au niveau des professionnels des médias eux-mêmes n’est pas observable et ne préfigure aucun espoir.
Justement, l’espoir ne peut être redoré que sur la base d’un Plan d’espoir en faveur des archives audiovisuelles, déconnecté des autres documents, et qui engage les efforts constants de l’Etat, souligne la responsabilité des acteurs des médias tant du secteur public que privé et aboutit à un projet structurel conçu pour renforcer le suivi des engagements. Ce Plan doit être véritablement conçu comme un instrument-clé de sauvetage immédiat.

Au Bénin, nombre de personnes détiennent des fonds privés, et il est utile de les « associer au sacrifice » pour la quête de l’histoire. Actuellement, les pistes suivent très peu cette direction. Or, il est important d’y recourir en instaurant la réflexion sur les aspects connexes auxquels cette solution fait appel. C’est par exemple la question des droits, dans le sens où il faut rassurer les vrais propriétaires sur la paternité de l’œuvre.

Evitant la disparition totale de son trésor audiovisuel, le Cambodge miné par plusieurs années de guerre a trouvé une formule de perpétuation dans la création d’un Centre National de Ressources Audiovisuelles. Un cadre de fixation et de sécurisation qui donne vie aux documents à travers un dispositif de consultation et d’exploitation.

Le Plan d’Espoir auquel nous faisions référence doit être en mesure de dégager la création d’un cadre de conservation et de consultation dans ses finalités. Ce qui va alors obliger les acteurs impliqués à être plus attentifs à la sauvegarde, condition indispensable à l’enrichissement continu des fonds.

Mais encore faudrait-il qu’il y ait suffisamment de volontés pour y arriver.

Numériser…numériser encore, mais numériser l’essentiel

On ne le dira jamais assez. La numérisation des documents d’archives représente la solution face au péril qui menace les contenus des archives audiovisuelles. Son intemporalité comparée à la caducité des modèles technologiques jusque là utilisés constitue un argument de taille sur lequel les esprits les plus controversés s’accordent. Même si les pays riches ont du mal à s’en sortir en raison du coût élevé de l’opération, c’est Emmanuel Hoog, PDG de l’INA qui affirme que la solution passe indubitablement par là. Pour les pays du Sud, un peu en retrait du continent numérique, ça peut paraître difficile comme approche. Difficile, mais pas impossible.

L’essentiel se situe dans la planification et la méthode. Voilà pourquoi, il faut axer la démarche sur les supports à moindre coût et les critères de sélection des contenus.

Le CD et le DVD d’après certaines études ont une durée de vie d’au moins 100 ans. A certains égards, il est possible de leur faire confiance. Dans beaucoup de pays riches, ces supports sont sélectionnés et servent toujours à la conservation.

Par ailleurs pour minimiser les faramineux coûts, il est illusoire de prétendre tout numériser. Seuls les documents ayant une valeur historique, culturelle et présentant un caractère unique sont à privilégier, si l’on veut atteindre l’objectif éducatif et culturel relié au patrimoine audiovisuel.

Godefroy Macaire CHABI

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