dimanche 24 octobre 2010

Abdou Diouf reconduit à la tête de l’OIF

La Francophonie lui ressemble

par Godefroy Macaire CHABI

Les Chefs d’Etats et de gouvernements de la Francophonie viennent de reconduire pour un nouveau mandat de 4 ans le sénégalais Abdou Diouf à la tête de l’Organisation internationale de la Francophonie,OIF.
Très sincèrement en apprenant cette nouvelle, je n’en fus guère surpris. Car le bruit courait depuis quelques semaines voire des mois que l’ancien Président sénégalais allait continuer l’œuvre entamée.
Tout ce que je ressentais pour l’homme se trouve en effet dans le travail qu’il a abattu ces huit (8) dernières années à la tête de l’OIF et que le Ministre français des affaires étrangères, Bernard Koutcher a su traduire il y a quelques jours à Montreux sur les ondes de Radio France Internationale en plein travaux ministériels de la Francophonie.
Globalement pour M. Kouchner, Abdou Diouf a réussi à donner à la Francophonie toute la bonhomie humaine qui le caractérise et a su intégrer la couleur africaine à la gestion de l’organisation.
En un mot, avec M. Diouf, l’organisation a beaucoup rayonné et évolué considérablement dans ses missions.

Les axes prioritaires de la Francophonie dont les plus importants sont la diversité culturelle, le développement durable, les droits de l’homme, la démocratie et la gouvernance ont reçu un énorme coup de fouet, au point où il n’est plus un secret pour personne que la Francophonie est devenue plus que par le passé un puissant outil de développement, pour ceux qui n’y voyaient jusque là qu’un simple instrument de défense de la langue française ou se posaient encore la question de son utilité face aux grands enjeux contemporains.

Moi, j’ai coutume de dire que Diouf ressemble à la Francophonie et la Francophonie lui ressemble.
Pour tout dire, c’est l’image qui me vient en tête à chaque fois qu’on évoque le nom « Diouf » ou le mot « Francophonie ».

Il a eu le trait de génie et d’illumination d’imprimer sa marque à l’Organisation et tous les Etats Francophones ou amis s’y sont retrouvés.

« La Francophonie est politique par nécessité et culturelle par essence ». Voilà une phrase que je tiens de Jean Louis Roy, cet ancien Secrétaire général de l’Agence intergouvernementale de la Francophonie en couverture de son livre Quel avenir pour la langue française ?. Et avec Diouf, on est dans la stricte application de cette réalité de l’adaptabilité de la Francophonie.

Instrument communautaire s’organisant au départ autour d’une langue, la Francophonie vit maintenant plus que jamais avec son époque et y prend solidement pied. C’est cette actualisation grandissante qui fait son charme et la rend absolument utile pour l’ensemble de ses membres et le reste du monde.

A quoi servirait une Francophonie qui ne fait pas entendre sa voix ou qui ne propose pas sa solution ? L’état d’âme linguistique ne doit pas disparaître, mais elle doit s’arrimer à toute logique d’activisme autour des grands débats de notre siècle.

C’est à mon sens ce que Abdou Diouf a compris. Peut être qu’on trouverait normal qu’il continuât une fois encore l’héritage de Senghor, mais reconnaissons qu’il a l’intelligence et le trait de génie de s’affirmer à sa manière. Voilà pourquoi la Francophonie lui ressemble.

jeudi 14 octobre 2010

Sauvetage de 33 mineurs au Chili

La symbolique médiatique de la libération

Godefroy Macaire CHABI

Le monde entier a assisté ces dernières heures en direct à l’opération de sauvetage des 33 mineurs chiliens engoncés pendant 68 jours au fond d’une mine de San José. Pour une énième fois, les caméras des télévisions du monde ont jeté leur dévolu sur cet épisode contribuant à tourner ce qui relève d’un scénario de cinéma. Les médias ont démontré ainsi leur appétit incompressible pour ce qui va au delà de l’information et se rapporte à l’humain et à sa condition.

Finalement l’intérêt que le monde entier a porté à cet évènement traduit en psychologie de la communication l’envie de démontrer toute une sensibilité au drame humain. Le pari a été largement gagné.

Mais les médias classiques que sont la télévision, la radio et la presse écrite ne nous ont-ils pas eux autres habitué au fait que l’information qui impacte le grand nombre était leur tasse de thé ? Là encore, nous devrions y être, à en juger par la cohérence presque agressive de leur démarche : 33 mineurs abandonnés aux roches à plus d’un demi kilomètre de profondeur, non seulement ça suscite le pathos de l’ensemble de la planète, mais cela implique des centaines de milliers de personnes dans un contexte sud américain où quoique en phase de modernisation avancée, la notion de solidarité, de famille et de groupes sociaux reste marquée.

Pour ceux qui y ont vu de l’exagération ou du harcèlement médiatique, il y a probablement moyen de les ramener à la raison et d’opposer l’argument basique qui fondent la vision des médias, ainsi décrit ci-dessus.

Il y a peut être lieu aussi de s’interroger sur la limite morale à ne pas franchir par le système médiatique ou tout simplement « l’effet médiatique » dans ce genre de drame. Au Chili, ça s’est fort heureusement bien terminé et l’indifférence voire l’insouciance médiatique face au déchirement intérieur des familles des mineurs semble probablement anecdotique par rapport à ce qu’elle avait été quelques mois plus tôt lors du tremblement de terre dans ce même pays.

La concurrence médiatique enlève malheureusement à l’effet médiatique toute rationalité le contraignant à développer un semblant de compassion qui sape la profondeur du drame. Tout cela parce que les médias sont embarqués dans le processus de leur propre propagande (T. Adorno) en s’appuyant de plus en plus sur les ingrédients que leur offre malheureusement la nature.

S’ils ont donné à voir, à entendre et à lire à temps réel et au plus près de l’évolution du sauvetage chilien, ce n’est pas forcément parce qu’il est dans leur intérêt que l’opération connaisse un tel dénouement. Une chose qu’on ne dira jamais, c’est que la fonction médiatique est aussi celle du chaos, du désespoir et de l’échec. Le probable insuccès de l’opération aura provoqué une autre frénésie, nourri d’autres excitations et entretenu une fièvre mondiale dont l’effet dépasserait la récolte du succès. Le pouvoir Pinera et ceux qui l’ont précédé se verrait ainsi brocarder sur leur incapacité à mettre de la discipline dans une filière. Et dans un effet d’emboîtement, d’autres critiques apparaîtront sur bien des aspects. Il semblerait bien que le déploiement de la machine ne serait pas insensible à cette éventualité.

Alors, les premiers qui raconteront ce « chaos éventuel » seraient frappés d’un maximum de crédibilité aux yeux de leur public, contribuant ainsi à « l’effet Mainstream » (Frédéric Martel) recherché continuellement par l’industrie médiatique.
C’est aussi comme cela que se développe la mentalité médiatique dans un dualisme compassion-cynisme dont elle n’a pu se sortir jusqu’ici.